[COMMUNAUTÉ] Portrait de Fanny Gouel, étudiante


S’ENGAGER EN TOUTE SENSIBILITÉ, TISSER DES LIENS




Fanny Gouel termine sa troisième année de licence « Frontières du Vivant ». Elle en ressort déjà grandie, confiante, et avec de nombreux projets en tête, pour des structures hybrides qui cassent les silos. Fanny souhaite ainsi favoriser le vivre-ensemble et construire une société plus juste. Rencontre avec une étudiante sensible et engagée.


Fanny est à Marseille quand nous nous rencontrons. Une ville que la Parisienne de souche affectionne particulièrement : « C’est très pollué et très sauvage à la fois. Il y a beaucoup de nature dans et autour de Marseille. » Fanny a découvert la ville en mars dernier, en faisant son stage au LICA, Laboratoire d’Intelligence Collective et Artificielle. Cette SCOP (société coopérative) à la gouvernance partagée sensibilise aux questions sociales, numériques et écologiques en accompagnant des organisations (associations, entreprises) et en mobilisant l’intelligence collective afin de construire des projets coopératifs et pédagogiques. Le tiers-lieu du LICA, le 15, est un « Tiers-Lab des transitions » en construction, que Fanny co-pilotait dans le cadre de son stage.

« Ce lieu souhaite incarner un petit écosystème et être un espace d’expérimentation. Je m’y sens vraiment bien. Il y a un jardin de 6000 mètres carrés et les gens qui travaillent ici sont des couteaux-suisses multitâches, capables de travailler en groupe et curieux de tout. »

La curiosité, c’est ce qui caractérise Fanny depuis son plus jeune âge. Adolescente, elle est intéressée par de nombreux sujets et souhaite intégrer Sciences Po ou une prépa BL après le lycée, pour garder une certaine multidisciplinarité. Déléguée en classe de terminale, elle entend une professeure évoquer la licence Frontières du Vivant lors d’un conseil de classe. Quelques recherches plus tard, Fanny décide de postuler, et elle intègre le programme. À la rentrée, elle participe à un moment fondateur : la semaine d’intégration à Bidart, dans le Sud-Ouest. « Je ne connaissais vraiment personne ». Les étudiants passent leurs journées et leurs soirées ensemble, à faire des ateliers scientifiques, des ateliers de design, d’intelligence collective, à jouer, à faire de la musique, à boire des verres… Dans cette atmosphère privilégiée, Fanny règle certains de ses inconforts pour ressortir de la semaine plus confiante en elle et dans le collectif.

« Ici, on partait tous du même niveau. Ces moments nous ont permis d’interagir, de discuter de ce qui se passait en nous… ça m’a beaucoup touchée (…) Le dernier jour, j’ai pleuré comme pourrait le faire un enfant à la fin d’une colo ! »

Le programme d’intégration fédère les étudiants de la promo Oxygène (8ème promotion et 8ème élément chimique du tableau périodique) et pose les bases des travaux qu’ils réalisent en groupe tout au long de l’année : « On a beaucoup bossé et passé du temps dans des salles sans profs jusqu’à tard le soir. On a partagé des choses que tu ne partages parfois pas avec des amis que tu as depuis cinq ans. C’est très fédérateur. Pendant le Covid, on s’est vraiment entraidés. Pour beaucoup, on était de vrais piliers les uns pour les autres. »

Le programme Frontières du Vivant est une licence bien particulière selon Fanny. Les étudiants y font de la biologie, de la physique, des maths, les cours sont exigeants et le planning dense. Mais ils apprennent aussi à être autonomes, créatifs, à contacter des chercheurs… « Cela m’a déstabilisée dans le bon sens du terme ». Au sein de la licence, l’accent est mis sur le chemin, la méthode scientifique, plutôt que les résultats et les connaissances strictes. « C’est une expérience stimulante et émancipatrice ». Fanny a ainsi entièrement choisi son sujet de recherche en stage à l’université Paris-Saclay l’année dernière, sur la relation que les urbains entretiennent avec la biodiversité qui les entoure. L’étudiante a aussi initié et organisé en 2019 avec quatre autres jeunes une Journée pour le Climat : « On s’est donné beaucoup de mal. On avait un budget prédéfini et on pouvait en faire ce que l’on voulait, on avait carte blanche. » dit-elle, encore enthousiaste. L’événement, qui s’est déroulé dans les locaux du Learning Planet Institute (anciennement CRI), a rencontré un franc succès puisqu’il a rassemblé plus de 300 personnes qui ont pu assister à des interventions de l’ingénieur agronome Marc Dufumier ou du chercheur en neurosciences cognitives Thibaud Griessinger, à des conférences sur le 0 déchet et l’économie circulaire, ou encore à une menée par le Shift Project. Le public a également participé à des ateliers de la  Fresque du Climat et du jeu de rôle « HeatWave in MyCity ».

Aujourd’hui, Fanny et d’autres alumni se mobilisent pour la licence Frontières du Vivant, dont les financements vont s’arrêter en 2024. « Nous sommes conscients de la chance d’avoir connu cette formation et d’avoir pu y prendre part, saisir toutes les opportunités que celle-ci peut nous offrir, et que c’est pour cela que nous aimerions vivement qu’elle perdure pour les générations d’étudiants à venir ! »

Fanny a développé une vraie capacité d’adaptation ces dernières années. « Je ne sais pas exactement ce que je vais faire mais ça ne me fait pas plus peur que ça. On va être amenés à changer de métier, à devoir s’adapter. J’apprends à prendre les choses comme elles viennent. » Elle a aussi plus confiance en l’avenir. « Avant, j’étais une personne très stressée. C’est probablement parce que je n’étais pas au bon endroit… » Avec le Learning Planet Institute et le LICA, Fanny a trouvé des environnements qui lui correspondent. « J’aime les structures hybrides qui partent dans tous les sens. », explique-t-elle d’un air malicieux. Elle est particulièrement épanouie lorsqu’elle peut construire des ponts pour une société plus solidaire et écologique : rapprocher le monde de l’éducation et celui de l’entreprise, le social et l’écologie, le politique et le citoyen… Et malgré un stage de recherche passionnant l’année dernière, elle souhaite aussi faire du terrain, avoir un vrai lien avec d’autres personnes.

« J’ai besoin de faire quelque chose dans l’action, dans l’impact direct ».

Fanny aime beaucoup le rôle de facilitatrice, qu’elle découvre dans le cadre de formations à l’intelligence collective au LICA:

« Faire attention à ce que tout le monde prenne la parole, assurer un design, se mettre au service du groupe, c’est passionnant. » Fanny, à la grande intelligence émotionnelle, voit aujourd’hui sa sensibilité comme un atout : « Au CRI (Learning Planet Institute), on peut faire des sciences sans mettre les émotions de côté, et je trouve cela vraiment important. Si on pouvait accepter les émotions, les sensibilités de chacun et chacune, pouvoir être entièrement nous et fiers de nos sensibilités, et être dans l’écoute et le partage de cela, le monde irait sans doute déjà mieux. »


Un portrait de Marie OLLIVIER

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