L’éducation et la jeunesse comme réponses à nos crises contemporaines

Retour sur le sommet de l’Éducation de l’ONU et la conférence Global Futures avec François Taddei

LearningPlanetInstitute Portrait Franc ois Taddei Quentin Chevrier 5 L'éducation et la jeunesse comme réponses à nos crises contemporaines
Learning Planet Institute – François Taddei ©Quentin Chevrier

“Faisons en sorte que les élèves d’aujourd’hui et les générations futures puissent accéder à l’éducation dont ils ont besoin, afin de créer un monde plus durable, plus inclusif, plus juste et plus pacifique – pour toutes et pour tous.” C’est par ces mots qu’António Guterres, Secrétaire Général de l’ONU, a ouvert le Sommet sur la Transformation de l’Éducation qui a eu lieu le mois dernier à New York.


Pendant quatre jours, du 16 au 19 septembre, le Sommet de l’ONU s’est employé à placer l’éducation au premier rang de l’agenda politique mondial, en s’appuyant sur le constat suivant : “dans un contexte de crise climatique, de transformation technologique rapide, de changements profonds du monde du travail, d’une baisse de la confiance dans les institutions publiques, de l’érosion des valeurs démocratiques […], les systèmes d’apprentissage actuels ne répondent plus aux besoins des enfants, des jeunes et des apprenants de tous âges.

Du fait de son expertise en matière d’éducation, le Learning Planet Institute – représenté par François Taddei, son fondateur et président, Gaëll Mainguy, Directeur Adjoint et Leonora Dowley, Cheffe de projets partenariats – était invité à participer à l’événement.

Aux mêmes dates et également à New York se tenait la Global Futures Conference 2022 (ou GF22), dont l’Institut est partenaire. Co-organisée par la Arizona State University et la Earth League, la GF22 réunit des membres des secteurs publics et privés, des scientifiques, des jeunes et des militant·e·s du monde entier autour de la question suivante : “Quels sont les résultats à atteindre et les actions à entreprendre pour accélérer les transformations nécessaires à l’avènement d’une planète sûre, juste et habitable pour tous ?

Retour, avec François Taddei, sur ces deux événements internationaux majeurs.

Quelle était l’ambiance générale du Sommet de l’ONU ?

C’était une première pour moi d’assister à un Sommet de l’ONU mais, apparemment, celui-ci revêtait une caractéristique assez unique : il est rare qu’il y ait autant de jeunes intervenant·e·s. C’était aussi la première fois qu’ils ont pu remettre une déclaration écrite au Secrétaire Général qui était ravi de mettre en avant leurs recommandations. 500 000 jeunes à travers le monde se sont ainsi exprimés sur leur avenir devant les plus hauts représentants des États. Cette déclaration, remarquable, a été unanimement applaudie !


Nous affirmons qu’il faut adopter une approche intersectionnelle, intersectorielle et transversale, fondée sur les principes des droits de l’homme, du développement durable, de l’égalité hommes-femmes, de la justice climatique, de l’inclusion, de l’équité, de l’égalité et de la solidarité, dans toutes les actions visant à transformer l’éducation et ses systèmes aux niveaux local, national, régional et mondial.
Extrait de la Déclaration de la jeunesse sur la transformation de l’éducation


Vous avez par ailleurs participé au Global Futures 2022, l’événement et les discussions ont-elles acquis une dimension particulière à la suite du sommet de l’ONU ?

Très peu de gens avaient assisté aux deux événements : seulement notre équipe et des étudiant·e·s de l’Arizona State University, ce qui nous a permis d’avoir une vision et une approche plus globale.
Dès l’ouverture du GF 2022, on nous a demandé ce qu’on pensait du programme de l’événement. Et parce que l’on venait du sommet de l’Education de l’ONU, on pouvait dire : il faut donner la parole aux jeunes.
Ce qui était drôle, c’est qu’au départ, l’éducation avait un rôle très mineur dans les discussions du GF22. Néanmoins tout le monde s’est aperçu que, pour toutes les problématiques soulevées, les solutions proposées contenaient toujours et invariablement l’éducation.

Il y avait une urgence évidente dans le discours du Secrétaire Général, cela s’est-il aussi ressenti dans les échanges que vous avez eus ?

Oui, c’était très net. Ainsi, la conférence Global Future 2022 était uniquement consacrée à l’urgence. Les discussions sont parties d’un constat accablant : depuis l’établissement des Objectifs de Développement Durable en 2015, alors que les limites planétaires sont hyper fragiles, la totalité des États sont en retard sur l’atteinte de ces Objectifs.

Tout pointe vers une accélération des transformations à mener grâce à l’éducation. Il faut revoir l’éducation à l’aune des défis actuels et, notamment, des enjeux environnementaux. Il devient ainsi évident pour tous les acteurs de l’éducation qu’il faut “verdir” les programmes (“greening the curricula”), mais aussi les “bleuir”, c’est-à-dire les retravailler en ayant en tête les enjeux climatiques et les problématiques spécifiques des océans. On observe une prise de conscience globale sur le fait que les programmes académiques doivent être co-construits avec les jeunes. C’est ce que l’on s’emploie à faire au Learning Planet Institute.


Que retenez-vous de ce Sommet de l’ONU ? Comment cela va-t-il influencer la stratégie du Learning Planet Institute, ses propres réflexions, travaux et projets ?

Il était très intéressant de voir que nos priorités et préoccupations – la jeunesse et l’éducation – sont alignées avec celles de l’ONU et de l’UNESCO.
Au Sommet, nous avons constaté que beaucoup d’échanges reprenaient le concept de Global Citizenship Education (GCED). Soit, le fait d’envisager notre citoyenneté et la résolution des défis de notre temps de manière globale et ainsi devenir acteur·rice·s d’un monde inclusif, tolérant, pacifique et durable. Une notion qui se rapproche fortement de celle que nous déployons à l’Institut : le planetizen.

Pendant la conférence, cette idée de planetizen – celle de changer de paradigme, de regard sur nous-mêmes et sur la planète, a trouvé un fort écho.
Nous nous réjouissons de voir que des idées du Learning Planet Institute sont en accord avec les publics que nous avons rencontrés. Une partie de nos intuitions, de nos discussions résonne avec ce que veulent les jeunes et avec ce que veulent mettre en place les représentant·e·s. Cela renforce notre légitimité, et nous permet de faire de nouvelles rencontres, de créer des synergies et des collaborations.

La transformation du Learning Planet Institute s’inscrit dans cette volonté mondiale de prioriser l’éducation et la jeunesse. D’autres partenaires s’inscrivent dans cette même lignée, quelle est la particularité du Learning Planet Institute ?

Je dirais qu’il y a plusieurs éléments. Déjà, notre position de “middle ground” (NB : “terrain intermédiaire”) : celle d’être à la fois un centre de recherche et de formations et de favoriser l’entrepreneuriat social. Nous savons travailler, à la fois, avec les institutions et avec les acteur·rice·s de terrain.

Ensuite, contrairement à de nombreux programmes qui ne s’inscrivent pas forcément dans la durée, nous travaillons toute l’année avec les jeunes : les parcours académiques que nous proposons forment et outillent les étudiant·e·s pour qu’ils puissent agir sur leur environnement local et global. Et nous aimerions continuer à faire en sorte qu’ils co-construisent ces programmes avec nous.

Avec les jeunes de “Fridays for Future”, nous avons relevé l’importance de proposer des diplômes en adéquation avec les crises d’aujourd’hui. C’est une autre de nos compétences : nous avons cette capacité d’être à l’écoute des jeunes. Notre transformation actuelle, du CRI au Learning Planet Institute, s’inscrit dans cette optique : nous avons pour ambition de placer jeunesse et éducation au centre de nos activités.

Enfin, nous avons la capacité de faire de la recherche scientifique sur ces sujets pédagogiques, adaptant perpétuellement nos modes de transmission et nos programmes.

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SDG Summer School – Learning Planet Institute ©Quentin Chevrier

Y-a-t-il des défis à relever propres au système éducatif français ?

Il y a bien sûr des particularités françaises à prendre en compte. En France, on vient d’avoir des élections, ainsi qu’un nouveau Ministre (Pap Ndiaye), qui a annoncé un grand débat sur l’école, il serait louable que les jeunes soient inclus dans ces discussions.

Un des défis français, c’est aussi la pédagogie verticale. Si on veut apprendre aux jeunes à relever les défis, il ne faut pas seulement des cours mais aussi fonctionner par projets, par expérimentation, leur donner des moyens d’action concrets, essentiels dans notre contexte actuel.

Laelia Benoit a émis le souhait de collaborer avec nous. Elle est pédopsychiatre et chercheuse associée au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations de l’Inserm, mène des recherches sur l’impact du changement climatique sur le bien-être et la santé mentale des enfants et des adolescent·e·s, à l’université de Yale aux Etats-Unis. Elle constate que l’éco-anxiété va croissant mais que la meilleure manière de la traiter ce n’est pas de nier le problème – car, c’est de fait, un climat anxiogène -, ce n’est pas non plus seulement d’être bien ou mieux informé mais bien d’avoir le pouvoir de passer à l’action : de travailler dans un collectif, de monter des projets, de faire face aux problèmes ensemble.

Quelles sont les suites concrètes données à ces deux Sommets ?

A la suite du Sommet de l’ONU, il y a eu des annonces de financement, en particulier pour les pays les plus touchés par le Covid. En France, des financements ont été débloqués pour l’innovation pédagogique.

Au GF 2022, les chercheur·se·s ont compris qu’il fallait s’unir pour aller chercher de l’argent et se retrouver pour co-construire leurs recherches et créer des plateformes d’échange.

De notre côté, cela va nous permettre d’accentuer nos collaborations avec Global Futures, l’ensemble des acteur·rice·s de la recherche et de l’éducation et les jeunes de Fridays for future. Ce sera aussi l’occasion de renforcer nos liens avec l’Arizona State University avec laquelle nous aimerions construire différents programmes de recherche et d’enseignement.

Un mot, enfin, pour annoncer qu’une bonne partie des acteur·rice·s de ces deux sommets ont été invité·e·s à notre LearningPlanet Festival*, qui aura lieu du 24 au 28 janvier.


* Un événement qui célèbrera des centaines d’initiatives et acteur·rice·s du changement autour du monde autour de débats, de projections, de forums, des ateliers, de hackathons et bien plus encore, créés par l’Institut et ses centaines de partenaires dans le monde entier. L’occasion de s’interroger sur les nouvelles pratiques d’apprentissage, les technologies et espaces numériques, éducation au climat, le rôle de l’art et de la culture, les transformations systémiques pour apprendre à prendre soin de soi, des autres et de la planète.


Merci à François Taddei d’avoir répondu à nos questions !

  • Lire l’article « The Learning Planet Institute’s raison d’être and projects aligned with the UN Transforming Education Summit’s goals »
  • En savoir plus sur le Sommet de l’ONU sur la Transformation de l’Éducation
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